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Archéologie poitevine
24 janvier 2009

2009, année Calvin

Jean Calvin, Caulvin, ou Chauvin, Jean, né le 18 juillet 1509 à Noyon, Picardie, le plus éminent des réformateurs français et le plus grand théologien de son siècle.

D'une famille de moyenne bourgeoisie, il étudia d'abord à Noyon, puis vint à Paris, où il entra successivement au collège La Marche (sous Mathurin Cordier) et au collège Montaigu, où il put se rencontrer avec Loyola. Grâce à son père qui était syndic du chapitre de Noyon, il avait obtenu quelques bénéfices qui l'aidaient à vivre, mais il ne tarda pas à abandonner le théologie pour le droit, et se rendit en 1528 à Bourges pour y entendre Alciat, et l'an d'après à Orléans pour entendre P. de l'Estoile. Il perdit son père le 26 mai 1531, et fut reçu docteur en juin 1533.

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En avril 1532, il publia son premier livre, un Commentaire latin sur la Clémence de Sénèque. Malgré ses relations affectueuses et suivies avec son cousin Olivetan et avec le pieux Wolmar, il ne paraît pas encore à cette époque s'être joint au mouvement de réforme qui se faisait sentir si puissamment en France; le droit l'occupait seul. Un discours sur la foi justifiante, qu'il prépara pour le recteur Nicolas Cop, et qui fut prononcé le 1er novembre 1533, laisse bien entrevoir une réaction contre le dogme catholique, mais c'est seulement en mars 1534 qu'il accentue le changement qui s'est fait en lui.

Il doit fuir comme Cop, et se retire en Saintonge chez son ami le curé L. du Tillet. Il visite ensuite Nérac, Noyon où il va résigner ses bénéfices, Poitiers, Orléans, Bourges, peut-être aussi Strasbourg, Paris, où il rencontre Servet pour une 1ère fois. Après l'affaire des placards contre la messe, le 18 octobre 1534, la persécution l'oblige à s'enfuir à Strasbourg, puis à Bâle où, sous l'anagramme de Lucanius, il se consacre tout entier à l'étude. C'est là qu'il écrit en latin ce petit "livret" qui devint en mars 1536 l'Institution chrétienne, mais qui n'est pour le moment qu'une espèce de catéchisme; il lui donne pour préface, datée de Bâle le 23 août 1535, cette admirable épître à François 1er, où il plaide la cause de ses frères martyrs; et le livre lui-même, un des chefs-d'oeuvre capitale de la théologie réformée, se réimprime du vivant de l'auteur en 10 éditions latines et en 14 traductions françaises, avec des additions et chaque fois des développement nouveaux.

Sous le nom de Charles d'Espeville, et avec son ami du Tillet, seigneur de Hautmont, il visite l'Italie et voit à Ferrare Renée de France avec laquelle il étudie les questions religieuses qui agitent les esprits. En juin 1536 il retourne à Noyon pour mettre de l'ordre à ses affaires, et décide son frère Antoine à l'accompagner à Strasbourg et Bâle; mais Genève, et là Farel l'arrête par un appel solennel et pressant. En septembre il ouvre ses leçons de théologie et en décembre il est nommé pasteur. Son esprit vaste et lucide, sa volonté de fer lui assurent bientôt une autorité incontestée, comme le voit à la dispute de Lausanne et au synode de Berne. Le 1er janvier 1537, mémoire présenté au Conseil de la ville sur le gouvernement de l'Eglise; bientôt après, la publication d'un petit Catéchisme en français. Mais les Libertins lèvent la tête; ils ne veulent rien de la discipline dont ils sont menacés. Le 4 janvier 1538 les Conseils décident que la Cène ne pourra être refusée à personne, et comme les pasteurs résistent, ils sont bannis.

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Calvin se rend à Strasbourg où il organise des leçons et des prédications dès le mois de septembre. Il est reçu bourgeois, et en septembre 1540 il épouse Idelette de Bure. Il entre en rapports avec les protestants d'Allemagne, assiste aux conférences de Worms et de Ratisbonne, marque par son livre sur la Cène 1540 la différence de leurs vues sur ce point de dogme, mais n'en est pas moins apprécié par Luther.

Rappelé à Genève, il accepte malgré lui ce poste de péril et de combats, et dès son retour 13 septembre 1541 il fait rédiger les Ordonnances ecclésiastiques, assurant au Consistoire l'autorité d'un tribunal des moeurs, mais sans compétence pécuniaire ou matérielle. C'est ce que quelques-uns ont cru pouvoir appeler une espèce de théocratie, bien que l'Etat comme tel n'ait jamais été placé ni sous la direction, ni sous le contrôle de l'Eglise; le contraire plutôt serait vrai, puisque les écrits de Calvin lui-même devaient être soumis à une commission du Conseil avant d'être imprimés, et que ses prédications on plus d'une fois été censurées.

L'influence de Calvin s'exerçait surtout au sein de l'Eglise et sur les individus, sans distinction de grands ou de petits. Castalion, Ameaux, le pasteur H. de la Mare, Bolsec, Trolliet, les italiens Alciat, Blandrata et Gentilis; Gruet, sentirent tout à tout les effets de son pouvoir; les uns pour cause d'hérésie, les autres pour paroles légères ou méchantes calomnies. La condamnation de Servet a laissé sur mémoire une tache d'autant plus voyante qu'elle est isolée dans l'histoire de la réforme. Les libertins luttèrent avec énergie contre l'influence croissante de Calvin; ils se donnaient l'apparence d'être le parti genevois contre l'étranger, mais en réalité ils n'étaient pas un parti religieux, et plusieurs de leurs actes relevaient de la morale plus que du dogme.

Les réfugiés qui affluaient à Genève et qui étaient admis à la bourgeoisie (1360 entre 1548 et 1554) fortifiaient le parti de Calvin, et vers 1555 on peut dire qu'il était le maître de la situation. Le 5 juin 1559 il fonda l'Académie, qui devait pendant longtemps fournir des pasteurs aux églises de France et qui jeta sur Genève un si grand lustre. Il comprenait, comme tous les réformateurs, que l'instruction était l'auxiliaire indispensable de leur oeuvre, et que pour être efficace elle devait reposer sur la Bible.

Des milliers de savants et de martyrs sont venus s'inspirer de son esprit, pour reporter non seulement en France, mais en Angleterre, en Ecosse, dans les Pays-Bas, le long du Rhin, et dans toute l'Europe les fruits de l'enseignement qu'ils avaient reçu. Sa femme était morte en 1549; elle ne lui avait donné qu'un fils, mort en bas âge; on peut se demander l'influence qu'aurait eue sur ce caractère si plein de tendresse la vie de ce petit enfant. Mais lui-même déclinait, usé par les luttes, le travail et les maladies. Le 30 mars 1564 il siégea pour la dernière fois au Consistoire; le 27 avril il fait ses adieux aux membres du Conseil qui sont venus le voir; le 28 à ses collègues; le samedi 27 mai il "s'en alla à Dieu", comme disent les registrent. Le lendemain à 2h il était enterré à Plainpalais sans pompe et sans appareil; c'est à peine à si l'on croit savoir aujourd'hui où il repose.

On a peine à se représenter l'oeuvre immense à laquelle il a consacré sa vie et ses force: prédications, leçons, voyages, commissions législatives, luttes, visites, correspondances avec les princes, avec les églises sous la croix, avec les prisonniers et les martyrs (on a de lui 2025 sermons manuscrits, et ses lettres se comptent par milliers). Ajoutez à cela ses admirables et nombreux commentaires sur presque tous les livres de la Bible, et une foule de traités et brochures de circonstance, dont la seule énumération prendrait des pages. Un grand nombre de ses ouvrages ont été souvent réimprimés, plusieurs ont vu le jour pour la 1ère fois ces dernières années; ses Lettres, par Jules Bonnet, sa Correspondance par Herminjard; ses Commentaires sur les Psaumes, par L. Pilatte; ses Oeuvres complètes par Baum, Cunitz et Reuss. Sa Vie a été écrite par Théodore de Bèze, Henry, Kampschulte, Merle d'Aubigné, Bungener, Stähelin, Guizot, Hoff.

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L’Institution Chrétienne de Calvin

A l’origine Calvin et ses amis n’avaient nullement l’intention de rompre avec la hiérarchie, et de créer une scission dans l’Église ; car ils espéraient la réformer intérieurement par la prédication de l’Évangile de la grâce. Mais on leur ferma la bouche et le pape s’unit au roi de France, pour persécuter ceux qu’on nommait les « Bibliens, les Évangéliques ».

Calvin, pour sauver sa vie, fut obligé de s’enfuir de Paris à cheval, en octobre 1543, avec le chanoine du Tillet, et se réfugia à Bâle.
Pendant un séjour à Angoulême, chez du Tillet, qui possédait une merveilleuse bibliothèque de plusieurs milliers de volumes, Calvin avait rédigé des notes sur la doctrine de la Bible. Arrivé à Bâle, il s’installa dans une modeste pension d’étudiant, au faubourg Saint-Alban, et y vivait presque inconnu, sous le nom de Lucanus.

Il venait de terminer la rédaction du manuscrit de son exposé de la vérité chrétienne, lorsqu’il apprit (février 1535), que le roi François 1er répandait en Allemagne, chez les princes luthériens, le bruit que les Évangéliques de France étaient de dangereux révolutionnaires et anarchistes, « … une peste contagieuse qui prépare la plus abominable sédition, méritant les pires châtiments… ». Il frémit d’indignation et il écrivit, tout d’un trait, sa célèbre Épître au Roi, premier chef-d’œuvre de l’éloquence française, pour réfuter de si atroces calomnies. Il ne fallait pas que les martyrs, qui dans d’horribles supplices mouraient par fidélité à leurs convictions, fussent confondus avec de vulgaires et abominables fauteurs de désordre. Cette lettre servit de préface au livre qu’il préparait.

Si l’Épître est un éloquent plaidoyer, l’Institution en est le document justificatif. Elle démontre, elle manifeste que les Évangéliques sont des chrétiens bibliques, professant la doctrine des prophètes et des apôtres, celle de l’Église primitive, des chrétiens humblement soumis à l’autorité de la Parole de Dieu, des disciples du Christ-Sauveur, seul chez de l’Église et seul Médiateur entre Dieu et les hommes.

Le volume qui parut, en latin, en mars 1536, n’est qu’un relativement petit livre ­ – un livret – si on compare à l’édition définitive de 1559. Il pouvait aisément entrer dans une poche de grandeur moyenne. L’auteur, dans son exposition, suit l’ordre du catéchisme de Luther, à savoir :

  1. la loi (les 10 commandements) ;
  2. la foi (le credo ou symbole des apôtre) ;
  3. la prière (l’oraison dominicale) ;
  4. les vrais sacrements (le baptême et la Sainte-Cène) ;
  5. les faux sacrements (ceux de l’Église romaine) ;
  6. la liberté chrétienne (le devoir d’obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes).

Il se fondait ainsi sur des documents acceptés généralement comme revêtus d’une autorité absolue.

L’Institution Chrétienne est donc une somme biblique, son but est essentiellement de mettre en lumière la révélation de Dieu contenue dans les saintes Écritures de l’Ancien et du Nouveau Testament.

E 1541, à Strasbourg, Calvin en fit lui-même une traduction française, revue et considérablement augmenté. C’est le premier ouvrage de cette importance qui ait jamais été écrit en notre langue. Aussi l’Institution de 1541 est-elle un des grands monuments de la prose française, et sa publication marque-t-elle une date importante.

Plus tard, en 1559, Calvin remania complètement son exposé, et le développa encore davantage, tellement qu’il disait lui-même que c’était un ouvrage « quasi nouveau et de grand labeur ».

Essayons maintenant de donner une idée du contenu de ce livre, dont l’influence a été profonde et bienfaisante, en éclairant et affermissant les consciences troublées et leur faisant trouver le chemin de la vérité et de la paix.

Le premier livre est intitulé : De la connaissance de Dieu en tant que souverain créateur et gouverneur du monde. La création, la nature, porte la marque, l’empreinte de son auteur, et c’est un devoir religieux de l’étudier, d’apprendre à en connaître les lois admirables : les cours régulier des astres, le développement de la vie des plantes et des animaux, et l’homme, le chef-d’œuvre de la création.

Dieu étant la grande réalité qui domine et pénètre tout, notre vie est entre ses mains et il fait servir toutes choses à notre bien, à notre éducation spirituelle. Ses bienfaits nous disent sa bonté et sa fidélité, tandis que nos épreuves sont un école salutaire par laquelle il faut passer pour être détachés du mal, et formés à la patience, à l’obéissance et à l’espérance des choses meilleures que Dieu a préparées pour nous dans l’au-delà.

La grande preuve, le témoignage suprême de la fidélité de Dieu, c’est le don qu’Il a fait à l’humanité corrompue, incrédule, mauvaise, d’un Sauveur en la personne de son Fils.

Le deuxième livre de l’Institution traite de : Dieu en tant qu’Il est notre Rédempteur en Jésus-Christ. L’œuvre de la Rédemption a été préparée dans l’Ancienne Alliance par la Loi, qui nous révèle la miséricorde de Dieu, celui qui, par pure bonté, fait grâce aux coupables et les appelle à sa connaissance et à son service.

Jésus-Christ, Fils de Dieu et fils de l’homme, ayant vécu, ayant souffert et donné sa vie pour nous sur la croix, nous a acquis par ses mérites infinis le salut dont nous sommes indignes. – Qui sommes-nous que nous soyons l’objet de a grâce de Dieu, de son élection gratuite ?

Le troisième livre traite de : La manière de participer à la grâce qui est en Jésus-Christ, c’est-à-dire de l’œuvre du Saint-Esprit. C’est Dieu qui prend l’initiative de nous appeler à la foi, de nous donner la foi, de nous justifier, c’est-à-dire de nous accorder la rémission gratuite de nos péchés, dans aucun mérite de notre part. Et s’il le fait, c’est dans le but de nous régénérer, de nous renouveler entièrement et de nous sanctifier par son Esprit, de nous conduire, en détruisant en nous l’orgueil et l’incrédulité, à une vie qui soit une ascension vers la justice et la charité, un service véritable de Dieu et du prochain.

Le quatrième livre traite : Des moyens dont Dieu se sert pour nous convier à Jésus-Christ. Dieu nous aide dans notre faiblesse en établissant sur la terre son Église, le corps de Christ, la mère des fidèles, qui les nourrit de la substance de l’Évangile, de la Parole divine. Cette Église s’est corrompue du fait de la malice et de la perversité des hommes, mais Dieu l’a réformée et ceux qu’elle appelle doivent lui demeurer fidèles, par une franche et publique manifestation de leurs convictions.

Quant à l’État, le gouvernement politique, il fait régner l’ordre et la paix dans le monde, en réprimant les vices et les hérésies, et il doit soutenir l’Église, gouvernement spirituel, dans on œuvre d’éducation et de consolation des âmes.

Telle est très brièvement résumée la trame de ce grand livre, synthèse unique et admirable des enseignements de la révélation divine.

Calvin a accompli un tour de force, une œuvre magistrale, en faisant un tout cohérent, systématiquement ordonné, de ce qui dans les saintes Écritures nous est donné pour notre instruction et notre édification.

Le Dieu créateur et souverain du monde naturel et de nos vies personnelles, le Dieu Rédempteur qui nous appelle, quoique indignes, à participer à la grâce qui est en Jésus-Christ, et nous introduit dans son Église pour faire de nous ses enfants d’adoption, le Dieu auquel l’Institution rend témoignage, Calvin s’est donné à Lui tout entier, sans réserve, de tout son cœur et de tout son âme – prompte et sincère(1) –  c’est pourquoi il nous apprend à l’adorer et à le servir.

Par Eugène CHOISY, Professeur à la Faculté de l’Université de Genève.
Texte paru dans Jubilé de la Réforme 1536 1936, l'Almanch Jean Calvin Farel Viret.

(1) Devise et sceau de Calvin.


Oeuvres de Jean Calvin sur internet :

  • Le Traité de la Justification trad. du latin de son Institution de la religion chrétienne, par Jean de Labrune. Editeur J. Garrel (Amsterdam). 1693.
    BNF/Gallica. Fichier PDF.
  • Declaration comment Jesus-Christ est la fin de la Loy. Préface de Jean Calvin dans Le Nouveau Testament, c'est à dire, la Nouvelle alliance de Nostre Seigneur Jesus Christ. Reveu & corrigé de nouveau sur le grec, par l'advis des ministres de Geneve. Avec annotations reuës [sic] & augmentees par M. Augustin Marlorat. 1563.
    BNF/Gallica. Fichier PDF.

En latin:

Interim adultero-germanum : cui adjecta est ; Vera christianae pacificationis, et ecclesiae reformandae ratio. Per Joannem Calvinum. Éditeur : Omnisys (Cambridge (Mass.)). 1549.
BNF/Gallica. Fichier PDF.

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