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Archéologie poitevine
27 février 2013

« Amphitrite » ressuscitée

Publié le 24/02/2013 à 06h00
Par Philippe baroux

« Amphitrite » ressuscitée

Une intervention chirurgicale est en cours pour sauver un Monument historique.

Jean-François Coussy, Roger Touton et Philippe Tijou, devant «Amphitrite» posée sur la table d'opération du Chantier du Bois marin.
Jean-François Coussy, Roger Touton et Philippe Tijou, devant «Amphitrite» posée sur la table d'opération du Chantier du Bois marin. (photo pascal couillaud)

«Il revient de loin ! ». Soupir de soulagement, du responsable du patrimoine naviguant à la direction régionale des Affaires culturelles. Philippe Tijou foule ce matin-là le terre-plein du Chantier du Bois marin, à Saint-Georges-d'Oléron. Il s'enquiert de l'état d'avancement de la restauration de l'un des petits bateaux de travail parmi les plus fameux que compte la flottille patrimoniale charentaise.

C'est « Amphitrite ». Depuis novembre, il revient de loin, parce que les travaux entrepris vont bien au-delà de ceux que la visite sanitaire à laquelle il se soumet périodiquement, comme tout bateau classé Monument historique, avait identifiés. C'était en 2010, sous l'œil expert de Jacques Audouin, à Ars-en-Ré.

Importante restauration

Comme toujours avec les coques anciennes, les premiers démontages ont apporté leur lot de surprises. L'ancien sloup de pêche de 9,60 mètres était entré au chantier oléronnais de Jean-François et Julien Coussy, pour recevoir une nouvelle quille. Il en sortira à la fin du mois prochain, doté aussi d'une étrave, d'un tableau arrière, et de plusieurs varangues neufs. Une opération chirurgicale en profondeur sur le squelette du voilier, que les fonds de l'État et du Conseil général de la Charente-Maritime couvrent à 65 % (1). Charge au propriétaire de financer le solde.

Roger Touton ne s'en cache pas, sans ce montage financier, il n'aurait pas toute la sérénité nécessaire pour accomplir cette sauvegarde. Un chantier qui ouvre à ce retraité passionné par son bateau la perspective de le transmettre à ceux de ses nombreux enfants et petits-enfants qui aiment jouer avec son sillage. Quelque chose de l'ordre d'un passage de témoin à forte densité affective.

Lorsqu'il acquiert « Amphitrite », en 1988, Roger Touton est encore en activité en région parisienne. Il aime rejoindre l'île-de-Ré d'où est originaire son épouse, et où il vit désormais.

Un jour de traître coup de vent printanier, le Dragon aux lignes tendues qu'il s'était offert alors, pour des sensations dans l'écume, fut irrémédiablement endommagé. Jean-Marie Chauvet d'Arcizas, ce Rétais que l'on ne présente plus dans le paysage de la voile traditionnelle charentaise, croisa sa route, porteur d'une information capitale pour la suite. Il avait localisé « Amphitrite » sur les vases du chenal de La Cayenne, à La Tremblade. Désarmée depuis un an. « Je suis allé le voir aux vacances de Toussaint, j'ai été emballé, même si cela n'avait rien à voir avec un Dragon », évoque Roger Touton.

Première urgence : gréer le bateau. Cela sera fait au chantier naval le plus proche, la maison Paraveau de Marennes. Une bonne adresse. Le pont est aussi ouvert en « baignoire », pour que les enfants naviguent en sécurité avec leurs parents. Deux ou trois ans plus tard, le voilier sera doté d'un moteur Nanni. Une autre séquence importante de restauration consistera, par la suite, à réparer les dommages causés par des capricornes gourmands de sa charpente de chêne massif.

Pêche à la traîne

Plus aucune intervention de fond ne sera lancée, après. L'ordinaire de maintenance, si l'on peut dire, se résumant toutefois, pour ce type d'embarcation exigeante, en une vigilance à temps plein, et en soins réguliers et généreux. Roger Touton s'y applique. Pour mieux filer sa route à la barre, depuis son port d'attache de La Flotte-en-Ré, et caler ses deux cannes, érigées tels deux grands tangons, de part et d'autre de la coque. Il aime taquiner bars et maquereaux à la traîne, sacrifiant parfois à la photo de famille devant quelques « trophées » de pêche, en compagnie d'héritiers blondinets. Des images au doux parfum de vacances.

Il bichonne son bateau

« J'ai ce plaisir de la pêche », souligne celui qui, parmi les propriétaires de vieux gréements charentais est le seul à s'y adonner avec tant de bonheur et de régularité.

Roger Touton n'a donc pas rompu le lien avec la destination originelle d'« Amphitrite » (lire par ailleurs). La pêche sur les bancs qu'il repère au piqué des mouettes. Il bichonne son bateau, l'aligne dans les rassemblements de gréements traditionnels, et va jusqu'à lui offrir un deuxième carénage annuel quand se profile la régate de Saint-Trojan-les-Bains, à l'approche de l'Assomption. Cela à valeur de quelques places grappillées au classement…

Ainsi donc, l'homme qui rêvait des performances d'un Dragon, s'est-il arrondi comme la houle qui berce sa sage « Amphitrite » sur les eaux des pertuis. Pour cette conquête qui (re) vient de loin.

(1) Le montant de ces travaux de restauration est de 80 000 €.

La Rochelle · Saint-Georges-d'Oléron
Source de l'information et photographie: http://www.sudouest.fr/2013/02/24/amphitrite-ressuscitee-976355-1391.php
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