Camp Allaric s'expose à Poitiers (86)
Les Musées de la ville de Poitiers (Vienne) et de la Société des Antiquaires de l’Ouest organisent au Musée Sainte-Croix du 4 décembre 2008 au 1er juin 2009, une exposition sur l’habitat fortifié du Camp Allaric, à Aslonnes (Vienne). Coordonnée par Catherine Buret (conservatrice des collections pré et protohistoriques, Musée Sainte-Croix) et Christophe Maitay (assistant de conservation, Musée Sainte-Croix et UMR 6566), cette exposition vise à présenter à un large public les structures et le mobilier issus des fouilles archéologiques conduites sur le site depuis 1967. Elle marque l’aboutissement d’une étroite collaboration entre le Musée Sainte-Croix, antenne régionale de l’UMR 6566, et les responsables des fouilles, Jean-Pierre Pautreau, puis, depuis 2001, Christophe Maitay.
Un site de hauteur : le Camp Allaric
Musée Sainte-Croix, du 4 décembre 2008 au 1er juin 2009
L’exposition présentera le matériel archéologique issu des fouilles du Camp Allaric (Aslonnes, Vienne). Il s’agit d’un éperon rocheux occupant l’extrémité sud-ouest du plateau de Thorus, sur la rive droite de la Clouère, avant son confluent avec le Clain. Il est mentionné par A. Touzé de Longuemar en 1862, nommé d’abord « oppidum de Palerme » puis « oppidum de Biberon ».
L’intérêt exceptionnel de ce site tient à plusieurs facteurs.
Sa situation géographique au seuil du Poitou lui permet d’occuper un couloir naturel entre le Massif armoricain et le Massif central et d’être un passage entre le Bassin aquitain et le Bassin parisien, donc un lieu privilégié pour les échanges.
Sa
situation topographique de hauteur confère à ce camp de plus de deux
hectares, déjà protégé naturellement et équipé de dispositifs de
défense (levée de terre, fossés, rempart) une excellente position
stratégique.
Dans un contexte archéologique dense (mégalithes du
plateau de Thorus, tumulus du Clos de Biberon aujourd’hui disparu,
sépultures de Laverré), le Camp Allaric a connu une succession de
cultures depuis la fin du Néolithique jusqu’au second âge du Fer.
Les fouilles menées par Jean-Pierre Pautreau entre 1967 et 1993, reprises par Christophe Maitay de 2002 à 2005, ont livré un abondant mobilier en cours d’étude et de restauration, objet de conventions entre les musées de Poitiers et l’UMR 6566 de l’Université de Rennes 1 ainsi que la commune d’Aslonnes.
Deux phases d’occupation de la fin du Néolithique (fin du IIIe millénaire) ont été reconnues, l’une plus ancienne attribuée au « groupe Vienne-Charente » et l’autre de la « culture ou civilisation d’Artenac ». Elles ont livré un outillage en silex dont un poignard ainsi que des séries d’armatures de flèches, des haches et des parures en roches métamorphiques importées. La céramique, bien que fragmentée, nous donne une idée de la richesse des décors (incisions, pointillés). L’outillage osseux (poinçons, aiguilles), de même que la faune, est bien conservé.
Des
niveaux du Bronze final (III a ou III b archaïque et III b classique :
environ 1000-800 av. J.-C.), nous sont parvenus les vestiges d’un
atelier de fondeur dont un creuset en bon état. Le mobilier métallique
comprend de petits objets en alliage cuivreux : parures (épingles,
perle, bouton), armes (armatures de flèches), éléments divers (tiges,
anneaux, appliques…). On remarque une épingle à tête globuleuse dont
une partie de la tige porte un décor géométrique incisé. A la même
époque, on peut rattacher la découverte ancienne de l’épée de type
langue de carpe provenant de Bapteresse (collection de la S.A.O.). La
céramique à pâte généralement fine et homogène comporte des vases à
panse ovoïde et col évasé, des gobelets en bulbe d’oignon, des écuelles
et beaucoup de jattes à col vertical. Il existe des décors incisés
et/ou peints (rouge et noir), notamment ce fragment de vase à peinture
rouge portant une frise en damiers et également des figures en incision
de silhouettes anthropomorphes et de signes géométriques :
pictogrammes, anthropomorphes1 et de signes géométriques : pictogrammes
(fig. 2). Ces décors sont à rapprocher de ceux des vases de Rancogne
(Charente) et de Sublaines (Indre-et-Loire). En terre cuite également,
deux étonnantes figurines modelées représentant des quadrupèdes ont
donné lieu à plusieurs interprétations : jouets, maquettes, statuettes.
On trouve aussi des éléments de parures en terre cuite : bracelets,
perles.
Des structures d’habitat attestées sur le terrain par des
trous de poteau (chêne) et des traces de branchage (frêne) ainsi que
des fragments de torchis ont conservé les vestiges du travail du métal
ainsi que d’activités domestiques (fusaïoles).
L’occupation
du premier âge du Fer (± 800/750-450 av. J.-C.) est un des plus riches
de l’Ouest. Dans le matériel métallique, les objets en bronze perdurent
(bracelet, torque, fibule). Le fer se généralise sous forme d’outils
(couteaux, scie), d’armes (pointe de javeline). C’est aussi à cette
période qu’on rencontre les premiers exemples de céramique peinte au
graphite. Le répertoire de leurs formes est d’abord dans la continuité
de celles du Bronze final mais inclut aussi des vases à profils plus
anguleux, carénés, des récipients biconiques, des plats creux à parois
rectilignes. Le décor géométrique de ceux-ci est extrêmement varié. Les
analyses physico-chimiques des pâtes et des pigments permettent de
déterminer leur composition précise (oxyde de fer de type hématite).
Une vitrine est consacrée à ce matériel, sujet de la thèse de doctorat
de C. Maitay, soutenue en 2007 à l’Université de Rennes 1.
En
terre cuite également, une lampe à huile portant des traces de
combustion est un témoin de la vie quotidienne, ainsi que des morceaux
de clayonnage et de soles de foyer, vestiges exceptionnels d’un habitat
dont une partie a été comme « fossilisée » par un incendie.
La parure en lignite (matière organique fossilisée) déjà présente à
l’âge du Bronze, se développe : torques, brassards, bracelets portant
parfois un décor géométrique. Des perles fragmentaires en ambre
prouvent aussi les préoccupations esthétiques des habitants du Camp
Allaric et probablement les échanges à longue distance.
Du second âge du Fer subsistent des fragments de céramique gauloise et d’amphores italiques.
Cette exposition-dossier conçue comme un volet d’une série « Que réserve le musée ? Des origines aux premiers Celtes » sera accompagnée de conférences, d’ateliers (début 2009) et donnera lieu à l’édition d’un livret-guide (48 p.).